ASREEP :Compte rendu Séminaire d’étude sur la passe





                       

                                           
           ASREEP-NLS     
                  
                   
                               Compte rendu de la première séance
préparatoire

                                            Séminaire d’étude
sur la passe

                                 
                                    “La passe et la variété de ses
moments”



La première réunion préparatoire du
séminaire sur la passe a eu lieu le 26 septembre 2013. Dans une
ambiance de travail conviviale, nous avons commencé par nous
poser
des questions autour de l’acte et de l’amour à partir de deux
exposés. Le premier, “La passe à la lumière de l’acte
analytique”; portait sur L’acte analytique, séminaire
qui s’est déroulé entre novembre 1967 et mars 1968 et qui a été
interrompu par les événements de mai 68. C’est un séminaire qui
suit la « Proposition d’octobre 1967 sur le psychanalyste de
l’École », essentiel à mon avis pour entendre les témoignages
des AE et des intervenants dans le dispositif de la passe. Il
s’agissait pour moi de donner quelques repères sur le cadre
conceptuel dans lequel Lacan a inventé la passe.


Une question de Rose-Paule
Vinciguerra
dans son article « Une théorie atypique » m’a paru
pertinente pour cette démarche. « Il suffit de se former dans
les concepts lacaniens pour se dire lacanien en tant que
psychanalyste ? »


Ma lecture s’est faite autour d’un
concept, le “sujet-supposé-savoir”; depuis son
installation jusqu’à sa réduction à la fin de l’analyse, comme
dit
Lacan, à “n’y pas être”; qui est caractéristique de
l’inconscient lui-même. Nous voyons donc que de l’acte de
l’analyste, pour Lacan, dépend l’existence même de
l’inconscient.
L’acte analytique ne se déduit pas de la théorie de
l’inconscient,
cependant, en tant que création, il fait exister l’inconscient
structuré comme un langage, c’est-à-dire un réel structuré, qui
a
des effets.


Nous avons évoqué dans le dernier
point “Là où c’était … je dois devenir “psychanalyste”;
la question de l’acte comme rupture du cogito. Point difficile

Lacan situe deux “là où c’était” : le premier
attaché au sujet comme manque, castration, -phi, “je ne pense
pas”; et, à une place opposée, le sujet comme objet, objet
perdu, objet a, “je ne suis pas”. À la fin d’une
analyse, le sujet est divisé, conséquence de la perte qui
constitue
l’objet a. La perte est “la cause de soi” puisque le
sujet n’est pas “cause de soi”; pour résumer les propos de
Lacan.


À contre-courant de la conception
de
son époque sur la place de l’analyste, et dans une audace qui
nous
émerveille, Lacan soutient que l’analyste s’inscrit dans la
structure de l’inconscient, non pas avec son inconscient, mais
dans
sa position de sujet dans le réel de la structure. Dans son
acte,
donc, le psychanalyste ne pense pas.


Malgré la difficulté des concepts
évoqués, les intervenants ont participé activement, tant pour
éclaircir certains points que pour poser les questions qui les
taraudent, notamment le rapport de l’analyste à l’École.


Beatriz Premazzi



Quel destin pour l’amour ?


Point de départ, Neruda a dit :
« s’il n’y a rien qui nous sauve de la mort, au moins que
l’amour nous sauve de la vie ». Alors de quel amour allons-nous
parler ? Pourquoi parler d’amour dans un séminaire sur la
passe ?


En 1915 Freud1
écrit « Observations sur l’amour de transfert » et il
dit : « que les seuls obstacles vraiment sérieux se
rencontrent dans le maniement du transfert (…) si complexe, si
inévitable, et si difficile à liquider ». Voilà l’amour dont
on a parlé, l’amour du transfert. Que devient-il ?

Lacan ne perdra jamais de vue le
transfert freudien. Mais, il s’intéressera aux conditions logiques
de son apparition. Pour Lacan le transfert sera moins dicté par
les
impératifs de la mémoire et de l’histoire du sujet. Pour Lacan,
c’est un phénomène de structure, intimement lié à la
constitution même du sujet divisé par son entrée dans le langage.
Il fait du transfert une opération, qui sera aussi opérationnelle
pour la psychanalyse.


Il formalise la spécificité du
transfert lié à la psychanalyse à partir de ce que nous
connaissons comme le Sujet Supposé Savoir, et il indique que
c’est
une supposition du savoir, dont l’analyste, de par sa présence,
est pris. Cependant, Lacan affirme aussi que : « aucun
sujet n’est supposable par un autre sujet »2,
et signale que le SsS est un signifiant détaché de l’analysant.


Alors,
y
a-t-il de l’amour jusque là ? Pour parler de l’amour dans
l’expérience analytique, Lacan s’appuie sur le modèle du
banquet
socratique. L’amour repose sur la supposition d’un objet,
brillant et
merveilleux, sans semblable, l’
agalma que
l’amant postule au sein de l’aimé. Le savoir est au principe
même
de cette relation, le sujet suppose que c’est l’Autre qui l’a.


En faisant référence au travail sur
le transfert du cartel de ACF3,
nous clarifions ce point : « Plus ou moins rapidement en
effet, le névrosé introduit le savoir dans la cure : ” Allez
donc savoir ! Dieu sait pourquoi ! ” » dira-t-il pour
indiquer l’étrangeté d’un symptôme ou d’un acte manqué. Il
postule ainsi l’existence d’un sujet supposé au savoir. Pour
Lacan,
il n’y a qu’un seul sujet dans la cure, le sujet supposé savoir,
fonctionnant comme un pivot entre les partenaires. « Celui-ci
est identique à l’agalma (…), autrement dit, le
transfert
est un amour qui s’adresse au savoir ».


Alors, si l’amour est au début de
la
cure, quel destin, que devient-il à la fin ? Quel destin pour
le transfert et le savoir ?


À la fin d’une analyse, nous avons,
plus au moins l’habitude d’entendre parler de traversée du
fantasme, destitution subjective, du sinthome (selon les
différents
enseignements de Lacan), mais est-ce que nous parlons de «
traversée
du transfert ? de destitutions de l’amour ? Et le savoir,
quelle place a-t-il à la fin de l’analyse ?


J.-A. Miller dit : « il n’y
a pas de traversée du transfert mais plutôt résolution du
transfert”4,
alors pas annulation non plus ?


Pour sa part, Lacan dit5:
« avec ce que j’ai appelé la fin de la partie, nous sommes –
enfin- à l’os de notre propos de ce soir, la terminaison de la
psychanalyse dite superfétatoirement didactique, c’est le
passage
en effet du psychanalysant au psychanalyste ». Ce passage est
le résultat d’un changement de la position de l’analysant en
relation au savoir. « Au commencent de la psychanalyse est le
transfert »6,
et la supposition de savoir dans l’Autre. Alors, à la fin ?
Nous entendons parler de “non savoir”; mais non pas comme
ignorance, sinon comme un opérateur qui orientera celui qui
prendra
la position de l’analyste. Au début, il y a le Sujet Supposé
Savoir
et à la fin le désir de l’analyste ? Sur quelle forme ?


Lacan dit que : « le désir
du psychanalyste, c’est son énonciation ». Ceci est le
résultat d’un travail orienté par les principes de psychanalyse.
Ce
travail d’élaboration s’est fait dans le dispositif de la passe.
Alors, pouvons-nous dire que l’école est à l’horizon ?


Pour finir, pouvons-nous dire que
sans
amour il n’y pas de psychanalyse, et sans le désir de
l’analyste,
l’amour ne restera-t-il pas dans l’errance solitaire de
l’ignorance
du sens ?


Merci à tous les collègues présents
lors du séminaire pour leurs questions et interventions qui ont
permis de donner forme à ce texte.


Sandra Pax-Cisternas

1 S. Freud, La technique
psychanalytique,
XI, PUF, page
116.

2 J. Lacan, « Proposition du 9 octobre 1967 sur le
psychanalyste de l’École »,
page 247.

3 Cartel sur : « Le transfert »,
Hélène Bonnaud, Nathalie Georges, Patrick Monribot,
Marie-Hélène Roch. Jean-Claude Razavet (plus-un).

4
J.-A.Miller, « Remarques sur la traversée de transfert », In
Revue de la Cause freudienne, n°18, Paris, ECF, 1991, pp.
18-20.

5Ibid., page 251.

6Ibid., page 247.



Back to list