COMMUNIQUÉ DU CALM – Feb. 11 th 2013, 15 : 15 Paris Time





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institut lacan

institut.lacan@gmail.com
**************************
COMITE D’ACTION POUR
LA LIBERATION DE MITRA

COMMUNIQUE DU CALM
Feb. 11 th 2013, 15 : 15  Paris Time
NOUVELLES SIGNATURES (5)
 
ON NOUS ECRIT DE TEHERAN
BENOIT XVI ET MITRA
D’OU VIENT LE BONNET DE MARIANNE ?
 
 

1.    Florence Malraux

2.    Christian de Portzamparc, architecte

3.    Marie Desplechin, écrivain

4.    Gilles Lipovetsky, philosophe et  écrivain

5.    Fanfan Glucksmann, artiste

6.    André Glucksmann, philosophe et écrivain

7.    Roger Pol Droit, écrivain, journaliste

8.    Maire Jaanus, Professor of English, Barnard
College, the Liberal Arts College for
 Claude-LucasWomen in New York City

9.    Henri de Riedmatten, historien de
l’art,  Rome

10. Huguette de Broqueville, écrivain

11. Jérôme Chartier, député du Val d’Oise

 

ON NOUS
ECRIT DE TEHERAN

Eve-Miller Rose nous informe que
nous franchissons le chiffre de 4000 signataires pour
Mitra sur mitra2013.com <http://mitra2013.com/>
 D’autre part, à partir de 16h 00, sur les sites de Lacan
Quotidien
et de La Règle du Jeu, on
trouvera un document original en version bêta,
intitulé On nous écrit de Téhéran. Les 3
premières personnes qui sauront nous dire, à l’adresse
électronique de l’Institut, de quelle formule
littéraire est inspiré le titre du document, recevront
un prix.
 

BENOIT XVI
ET MITRA

Mitra est le contraire de Benoît
XVI. On le verra en lisant les propos que nous avons
livrés au Point en ligne
.
Le pape Ratzinger était un
intellectuel distingué, dont les ouvrages méritaient
d’être lus la plume à la main. Après une période de
gaffes à répétition qui contrastaient avec la
réputation de Panzerkardinal, inquisiteur au désir
décidé, qu’il avait acquise durant le pontificat de
Jean-Paul II <http://www.lepoint.fr/tags/jean-paul-ii>
, il avait réussi à maîtriser sa communication. La
Curie avait même mis son nom sur Twitter <http://www.lepoint.fr/tags/twitter>
, @pontifex, gros succès médiatique. Il se retire
pour jouer Mozart <http://www.lepoint.fr/tags/wolfgang-amadeus-mozart>
au piano au milieu de ses chats, et se consacrer à
sa théologie. Il ne reviendra pas. Un pape, ce n’est
pas Cincinnatus. Ni de Gaulle.

Sa démission aura des
conséquences. L’Église est partout à l’offensive, en
France, en Angleterre, en Écosse, aux États-Unis, en
Amérique du Sud…, contre l’extension du mariage,
la procréation assistée, les dérives de la science,
pour la défense de la vie… Combat titanesque,
héroïque. Une posture nouvelle, risquée. Et voilà
que le commandant en chef des croyants “tire sa
révérence”; comme le dit irrespectueusement Le
Point.fr <http://Point.fr> .
Capitulation personnelle en rase campagne. Benoît,
le Bazaine de soi-même. C’est moche pour les
troupes.

En France, le mariage pour tous
passera plus facilement. On ne va plus parler que du
pourquoi et du comment de cette démission. Tous les
yeux seront tournés vers le conclave à venir. Les
spécialistes vont évaluer la valeur handicap de
chaque concurrent, ce sera haletant comme un Grand
Prix, plus encore. Selon toute vraisemblance, finie
la manif bis. Frigide va rester le bec dans l’eau.
C’est dommage. Benoît a posé un lapin à l’Univers.
On a envie de dire : “Ce n’est pas du jeu.” On
attendait un PanzerPapa, on a d’abord eu le pape
gaffeur, et maintenant, il passe à la trappe, comme
happé par le crochet d’on ne sait quel Ubu.

Raisonnable

Forcément, on est déçu. Il faut
supposer qu’il est mal. Mais le Polonais était au
plus mal, et il est mort à son poste. Comme Lacan.
Comme fera Elizabeth II. Martyrs de l’Idée. Pas la
même, mais l’Idée majuscule. Benoît fait comme la
reine Béatrice des Pays-Bas, la chose raisonnable :
il est vieux, fatigué, il prend sa retraite. Mais ce
n’est pas ce qu’on attend d’un pape ! Un mécréant
comme moi attend d’un Saint-Père qu’il se montre
increvable ! Qu’il meure dans ses bottes ! Qu’il
regonfle l’imago du père, laquelle en a bien besoin.
Que vous soyez catholique ou non, Jean-Paul II vous
soulevait de terre. Avec Benoît, on se sent
abandonné. C’est un lâcheur, à quitter, disent les
Américains.

Lacan, à son séminaire après la
démission de De Gaulle, disait quelque chose comme
ça. Là où le pouvoir est sérieux, on ne donne pas sa
démission, ou c’est une façon de parler : on vous
abat à la sortie. Maintenant, on démontre qu’on est
un incapable, infoutu de faire le job, on
démissionne, et il ne vous arrive rien. Beau progrès
! On n’a jamais ça à Rome, ni chez les Soviets, chez
les gens sérieux, quoi ! Cela veut simplement dire
que le pouvoir, le vrai, est ailleurs. J’ai un
candidat. Mais je le desservirai peut-être en disant
qui. Dieu reconnaîtra le sien. Ce que fait le Vieux
est bien fait.
<http://ad.fr.doubleclick.net/click;h=v8/3d87/0/0/%2a/x;44306;0-0;0;28136112;1007-190/60;0/0/0;;~sscs=%3f>


D’OU VIENT LE BONNET DE
MARIANNE ?
M. Heydari-Malayeri
(Observatoire de Paris)


Une version de cet article est
publiée dans la revue:  Historia <http://www.historia.presse.fr/>
, n° 679, juillet 2003, page 22 <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/historia.html>
.
Cet article nous a été communiqué par
Claude-Lucas Georges, artiste-peintre, au travail
sur le
dieu
gréco-romain Mithra.
 
Marianne <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/marianne_buste.html>
est un des symboles de la République Française, et
incarne la République autant que le drapeau tricolore.
Marianne représente la permanence des valeurs qui
fondent l’attachement des citoyens à la République:
Liberté, Égalité, Fraternité. Une Marianne est un
buste de femme coiffée d’un bonnet phrygien. Dans cet
article nous nous intéresserons à l’origine de ce
bonnet.

Ce bonnet fut porté pour la première fois en France au
café Le Procope qui était un lieu de rendez-vous des
révolutionnaires. Il ressemble à celui que portaient
les esclaves affranchis dans l’Empire romain, esclaves
auxquels leur maître avait rendu la liberté et dont
les fils devenaient des citoyens à part entière. Le
bonnet phrygien était donc dès l’Antiquité déjà, un
symbole de liberté.
 
Les plus anciens vestiges de ce bonnet appartiennent à
Mithra, la divinité iranienne du Soleil, de l’amitié,
du serment et des contrats. Le mithraïsme était la
religion la plus répandue en Europe avant le
christianisme. Les statues de Mithra qui nous sont
parvenues de cette époque représentent Mithra portant
un bonnet phrygien et une cape flottante; il est
agenouillé sur le taureau primordial avec un poignard
dans la main droite et tirant la tête du taureau vers
l’arrière avec l’autre main.
 
 Mithra, habillé à la perse et portant le bonnet
phrygien, sacrifie le taureau primordial. Du corps du
taureau naquirent les plantes et les animaux
bénéfiques à l’homme, malgré l’opposition du Serpent
et du Scorpion, agents du Mal (Collection: Musée du
Louvre, Paris, France).
  
Durant la révolution française, les premiers bonnets
phrygiens apparurent sur la tête des français,
quelques mois après la prise de la Bastille. Ils
étaient faits de tissu rouge, et s’accordaient aux
vêtements rayés des plus fervents révolutionnaires,
les sans-culottes. Il semblerait qu’un bonnet
pratiquement identique coiffait les marins et les
galériens de la Méditerranée, et il est possible que
les révolutionnaires venus du Midi les aient amenés à
Paris. Porter le bonnet phrygien était en effet une
façon d’afficher son patriotisme. Ce bonnet fut
également l’un des traits marquants du 20 Juin 1792,
jour historique qui vit le peuple envahir les
Tuileries. La foule en colère parvint à atteindre le
roi lui-même, et un officier municipal nommé Mouchet
tendit au monarque un bonnet phrygien au bout d’une
pique. Le roi, sidéré, ne savait comment réagir. Il
s’empara du bonnet, et le posa sur sa tête. Le geste
apaisa quelque peu la hargne des assaillants.

Par ailleurs, le bonnet de Libertas, la déesse romaine
de la liberté, était le pilleus, un bonnet rond
ordinaire en feutre. Sur les anciennes représentations
de Libertas, en particulier sur la monnaie impériale
romaine, celle-ci tient un pilleus dans une main, et
souvent une baguette (vindicta) de l’autre. Libertas
ne porte cependant jamais le pilleus, et n’est pas
associée au bonnet phrygien.
 
Après avoir assassiné Jules César (44 av. J.-C.), les
conspirateurs ont défilé dans les rues en arborant un
bonnet phrygien au bout d’une pique. L’idée d’utiliser
dans l’art un bonnet sur une pique pour représenter la
liberté apparaît vers 1570 aux Pays-Bas dans les
oeuvres iconographiques. Mais le bonnet n’a aucune
forme particulière et se conforme souvent à la coutume
locale; il ne ressemble donc ni au pilleus ni au
bonnet phrygien. Cette tradition iconographique se
développe dans divers pays d’Europe et devient une
source d’inspiration pour les artistes américains au
cours de la lutte pour l’indépendance.
 
Le retour au bonnet phrygien, dans sa forme classique,
à pointe recourbée, se fait clairement en France aux
alentours de 1790. Sous l’influence des Jacobins, le
bonnet rouge devient un emblème important de la
révolution. Les révolutionnaires américains aussi
empruntent le bonnet de la liberté aux Français, mais
seulement une vingtaine d’années après la déclaration
d’indépendance.
 
Sous la 1ère République (1792-1804), des personnages
féminins, portant les valeurs de la liberté et de la
révolution, sont représentés par l’intermédiaire de
tableaux ou de sculptures. Ils sont parfois
accompagnés de piques ornées du bonnet phrygien. Un
décret de 1792 stipule que « le sceau de l’état serait
changé et porterait pour type la France sous les
traits d’une femme vêtue à l’Antique, debout, tenant
de la main droite une pique surmontée du bonnet
phrygien, ou bonnet de la liberté, la gauche appuyée
sur un faisceau d’armes, à ses pieds un gouvernail ».
On rencontre également à ses pieds les tables de la
Loi et la Déclaration des Droits de l’Homme présentées
au monde. Le nom de Marianne semble provenir de
Marie-Anne, très populaire au 19ème siècle. Les
contre-révolutionnaires appelaient ainsi de manière
péjorative la République. Or les révolutionnaires
l’ont adopté pour symboliser le changement de régime.
 
L’avènement du 1er Empire (1804-1815) affaiblit la
représentation de Marianne. Son nom réapparaît un
temps sous la seconde République (1848-1852), mais
prend souvent un sens négatif. Marianne est exposée
sous forme de statue ou de buste, particulièrement
dans les mairies, représentation directe de la
République. Elle porte un bonnet phrygien pour
valoriser le caractère révolutionnaire, qui est
parfois critiqué comme un appel à la désobéissance. Le
bonnet est donc remplacé par un diadème ou une
couronne, pour donner un caractère plus sage à
Marianne.
Durant le 2nd Empire (1852-1870), Napoléon III fait
remplacer sur les pièces de monnaie et sur les
timbres-poste la figure de Marianne par sa propre
effigie. La commune de Paris (1871) développe le culte
de la combattante révolutionnaire au buste dénudé qui
porte le bonnet phrygien rouge des sans-culotte, mais
elle n’est pas nommée Marianne.
 
Sous la 3ème République (1875-1940) deux modèles
s’affrontent, la statue à épis et la statue à bonnet
phrygien. La première représente une République
modérée, la seconde, que le peuple nomme Marianne, une
République révolutionnaire. Peu à peu la République
s’installe, et les bustes se multiplient dans les
mairies et les écoles. Un modèle est plus ou moins
imposé: c’est un buste de femme au visage jeune et
calme, portant parfois la couronne d’épis ou, le plus
souvent, un bonnet phrygien. Il faudra attendre
1897-98 pour que la 3ème République restitue, sur ses
monnaies, le symbole du bonnet phrygien.
 
Où était la Phrygie?
 
La Phrygie <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/phrygie.gif>
était un royaume situé au centre de l’Asie Mineure sur
le plateau d’Anatolie, à l’ouest de la Cappadoce <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/phrygie.gif>
et séparée de la mer Égée par la Lydie. On pense que
les Phrygiens étaient un peuple indo-européen
originaire de Thrace qui, vers 1200 av. J.-C., a
envahi l’empire hittite pour s’y installer. Sa
capitale se trouvait à Gordion, non loin d’Ankara
actuel (en Turquie), et la fameuse ville de Troie en
faisait partie, mais les limites de son territoire
variaient selon les époques. Leurs rois se nommaient
tantôt Gordias, tantôt Midas; l’un des Midas, qui a
régné entre 725 et 676 av. J.-C., fait l’objet de
légendes chez les Grecs, en raison de ses richesses.
Le royaume a été dévasté vers 695 av. J.-C. par
l’invasion des Cimmériens, peuple nomade indo-européen
venu des Balkans. L’état phrygien ne s’en est plus
jamais remis et passa progressivement sous la
domination de sa voisine la Lydie.
La Lydie <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/phrygie.gif>
se trouvait à l’ouest de la Phrygie, entre celle-ci,
la Mysie, la Carie et la mer Égée, et avait pour
capitale Sardes. Sous la dynastie des Mermnades
(687-546 av. J.-C.), la Lydie prospéra et fut le
royaume le plus puissant de la péninsule anatolienne.
Célèbre pour ses richesses (provenant des mines d’or
du Pactole) et pour ses offrandes aux sanctuaires
grecs, le royaume lydien fut le premier État à
pratiquer le monnayage. Son dernier roi, Crésus,
annexa par les armes toutes les villes grecques de la
côte d’Asie Mineure. Après un règne d’environ onze
ans, Crésus fut confronté à la menace des Perses, qui
venaient de conquérir la Médie voisine. S’alliant à la
Babylonie, à l’Égypte et à Sparte, Crésus envahit la
province perse de Cappadoce, en Asie Mineure. Le roi
Perse Cyrus le Grand, fondateur de la dynastie des
Achéménides, battit en 546 av. J.-C. l’armée lydienne
et entra dans Sardes. Il traita Crésus avec respect,
et celui-ci finit tranquillement ses jours à Ecbatane
en Iran comme conseiller de Cyrus. Après la conquête
des cités grecques d’Ionie par les Perses, une grande
partie de l’Asie Mineure, y compris la Phrygie, fut
placée sous le contrôle perse et divisée en plusieurs
satrapies. Cela dura plus de deux siècles, jusqu’à la
défaite des Perses par Alexandre le Grand en 334 av.
J.-C. La Phrygie occidentale, comprise d’abord dans le
royaume Séleucide, fut annexée au 2ème siècle av.
J.-C. par Pergame. La Phrygie orientale, entre le
Sangarios et l’Halys, fut occupée vers 275 av. J.-C.
par des envahisseurs celtes, les Galates. La Phrygie
occidentale fut annexée à la province romaine d’Asie à
la fin du 2ème siècle av. J.-C.. Au 4ème siècle de
notre ère furent formées deux provinces de Phrygie: la
Phrygie Salutaire à l’Est (Capitale: Synnada), et la
Phrygie Pacatienne, à l’Ouest (Capitale: Laodicée).
 
Durant les siècles où l’Asie Mineure faisait partie de
l’Empire perse <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/persian_empire.jpg>
, des Iraniens se sont installés dans cette région.
Même après la conquête d’Alexandre, des générations
d’Iraniens ont vécu dans ces contrées comme en
témoignent plusieurs indices, notamment des récits
grecs, des inscriptions tombales, et des pièces de
monnaie. Même des non-Iraniens d’Asie Mineure
portaient des noms perses (notamment Mithradate et
d’autres dérivés de Mithra). La route royale qui
reliait les capitales de l’empire, Persépolis et Suse,
à Sardes étant, d’après les historiens, sure et
pratique, elle facilitait l’installation des Perses
dans les régions fertiles de l’Asie Mineure. D’après
Xénophone, avant de construire la route royale de 2750
km entre Suse et Sardes, Cyrus le Grand a fait faire
des expériences sur l’endurance des chevaux afin
d’établir un système de relais rapide qui n’épuisait
pas les chevaux. Ce premier système de courrier
express au monde permettait de relier les deux bouts
de l’empire en sept jours et sept nuits en traversant
111 stations avec une vitesse moyenne de 15.3 km/h
(Minetti 2003). Et tout porte à croire que
l’aristocratie perse amenait de Perse la main d’oeuvre
qualifiée nécessaire pour l’agriculture. En effet au
4ème siècle de notre ère beaucoup de villages en
Cappadoce étaient peuplés d’Iraniens descendants des
premiers colons. Parmi eux, beaucoup d’anciens soldats
auxquels la terre était donnée avec obligation de
rejoindre l’armée en cas d’appel (Boyce 1997). Le
calendrier solaire cappadocien, en usage pendant des
siècles jusqu’en 400 apr. J.-C., était une réplique du
calendrier zoroastrien.
L’historien Bardesanes, qui vivait au 2ème-3ème
siècle, atteste qu’à son époque il y avait encore
beaucoup d’Iraniens vivant en Egypte, en Phrygie et en
Galatie et qui conservaient encore leurs traditions.
Comme dans la métropole, des prêtres s’occupaient des
affaires religieuses de la diaspora. Nous avons
également beaucoup d’informations sur des sanctuaires
zoroastriens d’Asie Mineure, le plus ancien ayant été
construit par Cyrus le Grand lui-même ou par ses
généraux à Cappadoce pontique au 6ème siècle av. J.-C.
Dans les colonies, cette fonction religieuse était
avant tout remplie par les Mages, qui avaient une
position importante dans la société, mais
n’appartenaient pas à la plus haute classe. En fait
les Mages n’étaient pas des disciples orthodoxes de
Zarathushtra et avaient conservé beaucoup d’éléments
de leurs croyances anciennes, notamment du culte de
Mithra. Ils avaient même réussi à prendre le pouvoir
par un coup d’état après la mort de Cyrus, mais
avaient été démis par Darius I. Après la chute de
l’empire perse et la disparition de l’élite
dirigeante, les Mages ont occupé le devant de la
scène, en Asie Mineure surtout. Mais à partir du 3ème
siècle de notre ère, les temples ont été supprimés par
le décret chrétien. Ceci étant, au 6ème siècle après
J.-C. encore, l’empereur perse Khosrow I Anushirvan a
négocié avec l’empereur byzantin la reconstruction des
temples du feu en Cappadoce, ce qui suggère que, même
à cette époque, il y avait des adeptes du culte perse.
 
Le nom de « bonnet phrygien » est dû aux Grecs qui
l’appelaient aussi « bonnet oriental ». Ainsi ce
bonnet n’était pas propre aux Phrygiens. Il coiffait
un grand nombre de tribus iraniennes, aussi bien
celles de la Cappadoce à l’ouest que les Scythes
(Sakas) de l’Asie centrale. Les représentations de ce
bonnet et de ses variantes sur les bas-reliefs de
Persépolis en témoignent. Par ailleurs, selon des
récits chinois, un marchand zoroastrien originaire de
Samarcande, qui voyageait en Chine au 8ème siècle de
notre ère, portait l’habit typique des Sogdes, dont un
bonnet phrygien (Whitfield 1999).
 
Qui était Mithra?
 
Mithra, nom provenant de la langue
avestique et du vieux perse, était la divinité solaire
la plus importante des peuples indo-iraniens. En
sanskrit il est Mitra, et en persan moderne il s’est
transformé en Mehr, qui signifie Soleil, amour, amitié
et serment. Les réformes religieuses de Zarathushtra
(Zoroastre) en Iran (dans les environs de 1500 av.
J.-C.) le reléguèrent au rang d’ange. Zarathushtra
établit Ahura Mazda, l’intelligence suprême, comme le
dieu unique. Cependant, la popularité de Mithra
s’accrût durant le 4ème siècle av. J.-C., et Mithra
occupa une nouvelle fois une place privilégiée dans le
panthéon perse. Mithra réapparut donc dans
l’épigraphie des rois perses à dater d’Artaxerxès II
(405-359 av. J.C.), il y était un dieu des armées en
même temps qu’un dieu de la justice divine. Les
soldats grecs au cours de leurs expéditions en Iran
connurent le culte de Mithra. Malgré l’effondrement de
l’Empire perse après l’invasion d’Alexandre en 336 av.
J.-C., Mithra garda de nombreux fidèles en Asie
Mineure et surtout en Arménie. Par la suite la
dynastie Parthe de l’Iran ( (247 av. J.-C. à 226 apr.
J.-C.) le vénéra et l’inclut parfois dans le nom de
ses rois, comme Mithradate Ier le Grand, ce nom
signifiant « donné par Mithra ».
 
Les Grecs d’Asie Mineure identifièrent Mithra à
Hélios, dieu grec du soleil, contribuant ainsi à
répandre son culte; il acquit de nouveaux attributs et
devint progressivement l’objet d’un culte à mystères.
La première congrégation fut créée à Rome, vers 68 av.
J.-C., par des soldats adulateurs de Mithra, sous la
direction du Général Pompée. Les colonies romaines,
nombreuses en Asie Mineure, constituaient des liens
entre la Perse et la Méditerranée et permirent la
diffusion du mithraïsme dans l’Empire romain. D’autant
plus que les légions envoyées par Rome dans les zones
frontalières restaient parfois des années en contact
permanent avec les Perses et que des régions
s’échangeaient entre les Perses et les Romains. Mithra
fit son entrée dans la littérature latine vers l’an 80
lorsque le poète Statius écrit: « Que tu préfères
porter, le nom vermeil de Titan, suivant la tradition
du peuple achéménide, ou d’Osiris frugifère, ou de
celui qui sous le roc de l’antre Persique force les
cornes du taureau récalcitrant:  Mithra! » En effet,
si le mithraïsme attirait esclaves et hommes libres,
le fait qu’il insistait sur des notions telles que la
vérité, l’honneur, le courage et la fraternité et
qu’il exigeait de la discipline, fit de Mithra le dieu
des soldats et des commerçants. On lui dédia des
temples et des lieux de pèlerinage à travers l’Empire.
Le culte de Mithra se répandit dans tout l’Empire
romain de l’Espagne à la Mer Noire en montant vers
l’Ecosse dans le nord et en descendant jusqu’au
Sahara. De nombreux vestiges de ce culte ont été
trouvés en Grande Bretagne, en Italie, en Roumanie, en
Allemagne, en Autriche, en Bulgarie, en Turquie, en
Arménie, en Syrie, en Israël, en Suisse (Martigny), et
en France (Bordeaux, Bourg Saint Andéol dans
l’Ardèche, en Alsace, Metz, et ailleurs). A Rome même
une série de temples étaient répandus dans toute la
ville, mais ils ont été détruits par les Chrétiens. On
en compte aujourd’hui à Rome une quarantaine, tandis
qu’à l’époque il devait y en avoir trois fois plus.
Selon Ernest Renan, « Si le christianisme eut été
arrêté dans sa croissance par quelque maladie
mortelle, le monde eut été mithraiste. »
 
Les Romains nommaient Mithra Deus Sol invictus, Soleil
invaincu. L’empereur romain Commode (161-192 apr.
J.-C.) lui-même fut initié au culte de Mithra, et sous
le règne d’Aurélien (270-275) le mithraïsme fut
proclamé religion officielle de l’Empire et l’empereur
l’incarnation terrestre du Soleil. C’est Aurélien qui
en 274 déclara le 25 décembre jour anniversaire de la
divinité (natalis solis invicti). Cependant lorsque
Constantin 1er (v. 274-337 apr. J.-C.) se convertit au
christianisme en 312 apr. J.-C., le mithraïsme perdit
de son influence et, après un bref renouveau sous
Julien dit l’Apostat (331-363), ce culte disparut. Ce
philosophe et poète, qui avait embrassé le mithraïsme,
tenta de restaurer le culte du Soleil. Ironie du sort,
il fut tué en 363 apr. J.-C., lors d’un combat contre
les Perses en Mésopotamie.
 
Noël, la naissance de Mithra
 
Malgré sa disparition, le mithraïsme
inspira beaucoup le christianisme, en particulier en
ce qui concerne Noël. La fête la plus importante dans
la religion de Mithra se situait au jour du Solstice
d’hiver, considéré comme le jour de naissance de
Mithra et la victoire de la lumière sur les ténèbres.
En effet, à partir du solstice d’hiver les jours
s’allongent de plus en plus avec la montée du Soleil
vers le Nord. Or le choix du 25 décembre par les
Romains pour le solstice d’hiver est dû à une erreur
commise lors de la réforme du calendrier romain. En
fait, Jules César établit en 46 av. J.-C. un nouveau
calendrier préparé par l’astronome Sosigène. Ce
calendrier, dit Julien, fixait le début des saisons:
le printemps au 25 mars, l’été au 24 juin, l’automne
au 24 septembre et l’hiver au 25 décembre. Mais ces
dates étaient en retard de un ou deux jours par
rapport à la réalité.
 
Chose étonnante, les premiers chrétiens ne célébraient
pas le 25 décembre et ignoraient la date de naissance
du Christ. L’Evangile de saint Marc, considéré comme
le plus ancien, ne parle pas de la vie du Christ, et
les deux seuls Evangiles qui évoquent sa naissance,
ceux de saint Luc et saint Mathieu, ne donnent
cependant jamais de date pour la Nativité. En tout
cas, d’après l’Evangile de Luc (2 :8), lors de la
naissance du Christ « il y avait dans la même contrée
des bergers demeurant aux champs, et gardant leur
troupeau durant les veilles de la nuit. » Or, le mois
de décembre en Palestine est généralement pluvieux et
il fait froid; les bergers ne laissent pas à cette
période de l’année leur troupeau en pâturage. Au 2ème
siècle apr. J.-C., une première mention de la fête se
trouve chez Clément d’Alexandrie qui, évoquant les
fidèles du théologien Basilide, nous apprend que
ceux-ci fêtaient le 6 ou 10 janvier le baptême du
Christ. Cependant dès la première moitié du 4ème
siècle la fête de l’Epiphanie réunit à la fois le
baptême et la naissance du Christ. Un papyrus datant
du 4ème siècle découvert en Egypte contient la plus
ancienne liturgie de Noël, célébrée alors dans la nuit
du 5 au 6 janvier. En somme, la fixation au 25
décembre a été décidée par le Pape Jules 1er en 340.
Ce choix semble donc avoir été éminemment tactique.
 
Le mithraïsme était riche d’éléments qui tiraient leur
origine des siècles et parfois même des millénaires de
culture indo-européenne, contrairement à la jeune
religion du Christ venue de Palestine. Par conséquent,
les premiers chrétiens romains, en abandonnant le
culte de Mithra, y restèrent longtemps encore très
attachés, d’où la présence de nombreux rites
mithriaques en christianisme. Par exemple, dans la
religion de Mithra on sacralisait le dimanche, le jour
du Soleil (d’où Sunday ou Sonntag). De même, le pain
et le vin étaient consacrés dans l’eucharistie. On
représentait Mithra naissant d’un rocher <http://aramis.obspm.fr/%7Eheydari/divers/rocher.html>
, en présence de bergers. De plus, le baptême chrétien
et l’utilisation de musique et de cloches ainsi que de
l’eau bénite proviennent du culte de Mithra. Quant au
clergé, il a emprunté le titre de « père » aux prêtres
de Mithra, malgré l’interdiction formelle du Christ: «
N’appelez personne votre « Père » sur la terre: car
vous n’en avez qu’un, le Père céleste » (Mt 23:9). Il
n’est donc pas étonnant que la mitre, le bonnet des
évêques, rappelle Mithra et que la coiffure d’apparat
du Pape, la tiare (un mot d’origine perse), dérive du
frigium ou bonnet phrygien.

Les cultes païen et chrétien à Rome coexistent et se
mêlent encore pacifiquement jusqu’au 4ème siècle.
C’est à cette époque que la célébration de Noël fait
son apparition et que le 25 décembre est choisi comme
date de naissance du Christ. Longtemps l’Eglise tient
compte des rites païens pour convertir les gens. Le
paganisme ne disparaît pas du jour au lendemain, car
les païens, surtout l’aristocratie, résistent. En
effet, l’Eglise, tout en maintenant les coutumes
païennes, changeait leur nom pour mieux imposer le
culte chrétien. Cependant, lorsque le christianisme
accède au pouvoir et devient la religion officielle de
l’Empire romain, le culte de Mithra n’est plus toléré;
les mithriaques sont même accusés de falsification
satanique des rites les plus saints des chrétiens.
Pour finir, le calendrier chrétien a été établi au
6ème siècle, plus précisément en 525, par le canoniste
Denys le Petit, qui fixa la date de naissance du
Christ ainsi que l’origine du calendrier chrétien.
Mais il s’est trompé de quelques années!

Mithra n’a pas disparu de son pays natal, l’Iran.
Durant les dynasties Parthes et Sassanides (3ème
siècle av. J.-C. au 7ème siècle apr. J.-C.), il avait
une place prépondérante même dans la religion
zoroastrienne. Sur les bas-reliefs sculptés dans la
roche, on le voit surveiller l’investiture des rois
Sassanides par Anahita, la déesse des eaux, de la
pureté et de la fécondation. Après l’invasion
islamique au 7ème siècle, Mithra semble constituer un
des éléments des mouvements de résistance iranienne et
on peut trouver des traces du bonnet rouge jusqu’au
15ème siècle. Mithra a aussi été une source
d’inspiration pour les mystiques et surtout pour les
grands poètes comme Hafez de Chiraz (14ème siècle).
Aujourd’hui, les Iraniens n’ont pas oublié Mithra: ils
célèbrent chaque année sa naissance le 21 décembre,
jour du solstice d’hiver, qu’ils appellent « nuit de
Yalda » (Yule chez les Scandinaves!). De plus, le
septième mois du calendrier solaire iranien <http://wwwusr2.obspm.fr/%7Eheydari/divers/ir-cal-fr.html>
 est consacré à Mithra, d’où son nom de « Mehr », tout
comme la grande fête de Mehregan, qui marque le début
de l’automne et celui du mois de Mehr. Ces fêtes
reprennent toute leur importance ces dernières années,
avec le retour des Iraniens à leurs anciennes valeurs
culturelles.
 
Quelle fabuleuse épopée que celle de ce bonnet. En
traversant les âges, il a su rester commun aux dieux
et aux hommes, témoin de tant d’évènements décisifs de
l’histoire de l’humanité.
 
Quelques références:
 
Mary Boyce, 1997, Iranian Diaspora,
pre-Islamic, Encyclopedia Iranica
 Frantz Cumont, 1913, Les mystères de Mithra,
Bruxelles, réimprimé Editions d’Aujourd’hui, 1985
 A.E. Minetti, 2003, Nature, 426, 785
 Martyne Perrot, 2000, Ethnologie de Noël, une fête
paradoxale, Paris, Grasset
 Susan Whitfield, 1999, Life along the Silk Road, John
Murray, London


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