FORUM EUROPÉEN- Du vertige à la vertu – du méconnu à l’inconnu

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Du vertige à la vertu – du méconnu à l'inconnu

Maria Novaes

« Je préférerais que mon fils meure dans un accident de voiture

plutôt que de le voir avec un moustachu »

« Jamais j'irai vous violer, vous ne méritez même pas ça,

vous êtes trop moche »

« Les gauchistes devront choisir entre la prison et l'exil.

Ils seront bannis de notre pays.

Ce sera une purge comme jamais le Brésil n'en a connu »

(Jair Bolsonaro)

L'entre-deux tours des présidentielles brésiliennes* a été marqué, entre autres, par une proposition très intéressante dans les réseaux sociaux. Pour essayer d'atteindre certains électeurs de Bolsonaro, quelqu'un a lancé comme défi que ces personnes ressentent les effets des paroles choquantes du candidat. Qu'ils puissent prendre la parole dans leur entourage et qu'en proférant ces mots, d'en faire ainsi l'épreuve et prendre la mesure de leur impact… sur eux même. Et peut-être changer d'avis ? Une rencontre ultime avec la partie méconnue d'eux même, celle sur laquelle la psychanalyse peut nous éclairer. À la rencontre de ce méconnu le corps ! – aurait pu s'appeler ce défi, rencontre ultime et ratée, au regard du résultat de ces élections.

Nous ne sommes pas dupes, quand traversés par les effets d'une cure ainsi que par l'enseignement de Freud et de Lacan, du fait que le malaise dans la civilisation est structurel. Le choix d'un sujet se situant entre le refoulement et l'agressivité, la pulsion de mort est inexorablement de la partie. Cela conduira certains, cherchant à rester sous l'injonction de l'amour du prochain, à nommer le « mal » à condition qu'il se situe dehors, chez l'autre. C’est le terreau fertile de la haine, invitée, voire protagoniste de ces élections. Vertige !

L'éthique de la psychanalyse comporte un savoir y faire avec l'inconnu, elle relève de l'impossible à tout dire. C’est une éthique du bien-dire qui n'éradique pas l'inconnu,  elle s’en soutient; elle se soutient de l'impossible à dire toute la vérité. « C'est même par cet impossible que la vérité tient au réel », nous dit Lacan dans Télévision, (p. 9). Pour échapper au vertige, la vertu du gai sçavoir, comme nous propose Lacan, encore dans Télévision (p. 40) car l’éthique du bien-dire permet d'apprivoiser cet inconnu du corps sans passer par le sens ou par  la compréhension (1).

Si on peut ici aujourd'hui faire référence aux discours qui tuent, c'est parce que le corps, cet inconnu dont on a parlé ici, grâce aux effets du discours psychanalytique, est aussi celui qui insiste en tant que méconnu, étrange au sujet – étrangeté que Freud a su néanmoins épingler comme la part la plus intime et qui, expulsée, donne corps à l'objet de la haine de l'autre.

Il y a deux ans, le président élu, à l'époque député, a justifié son vote pour la destitution de la présidente Dilma Roussef, en s'appuyant sur l'éloge du militaire responsable d'avoir torturé plusieurs femmes, dont l'ancienne présidente en question. Cela en dit long sur les ressorts de l'élection de cet homme. Mais cette phrase-là, prononcée par lui ce jour fatidique, je fais le choix de ne pas la dire ici.

* Prononcé le 24 novembre 2018, à l’occasion du colloque annuel de l’ACF Voie domitienne, « A la rencontre de cet inconnu, le corps »

(1) « Non pas comprendre, piquer dans les sens, dit Lacan, mais le raser d'aussi près qu'il se peut sans qu'il fasse glu pour cette vertu, pour cela jouir du déchiffrage, ce qui implique que le gay sçavoir n'en fasse au terme que la chute, le retour au péché » (Télévision, p. 40)

 

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