FORUM EUROPÉEN – ZADIG EN BELGIQUE – TEXTE DE OMAR BATTISTI – 1er DÉCEMBRE

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Le moment de décider

Omar Battisti

 

 

Je
considère comme emblématique la butée des prochaines élections européennes. Là
se décidera quelle route sera prise pour continuer à faire exister une vie
civile, où l’autre ne soit pas seulement une menace à éliminer, mais aussi un
étrange susceptible de nous contaminer. C’est du catastrophisme, ça ? Non,
c’est réel, plutôt.

 

Il y a
une voie qui est empruntée de façon quasi instinctive par une bonne partie des
gens : ce que je ne peux pas contrôler et n’entre pas dans le rang n’a pas
droit de citoyenneté, et donc la seule chose qu’il mérite est sa totale
élimination, non seulement de la scène publique, mais aussi de la vie de
chacun. Cela vaut pour les migrants, les femmes, les handicapés et toute autre
catégorie qui peut prendre la place du symptôme dont on voudrait se débarrasser
sans trop y regarder, à qui adresser une haine et un rejet viscéral. C’est une
question de contingence quelque soit la cible en vue, à l’intérieur d’une
logique de discours où la haine pour ce qui n’est pas à sa place est élu au
premier chef.

 

Il y a
une autre voie, peut-être plus folle encore que la précédente, celle de laisser
faire les choses, en se faisant les spectateurs impuissants et les victimes de
sa propre indécision. Dans ce cas aussi, il y a beaucoup de gens qui se prêtent
à ce scénario, et sont commodément installés en équilibre au-dessus de cet
abîme, attendant tout simplement d’être poussés. Tentative de suicide ?

 

Laissons
derrière nous la terminologie du XXe siècle. Avec Jacques Lacan on pourrait
indiquer les deux voies que sont celle du père ou celle du pire (1), cette
dernière  n’étant pas choisie par lui, « pour une question d’honneur.
Il s’agit du sens d’une pratique qu’est la psychanalyse » (2).  

 

Mais entre la froideur et la folie

Il doit
bien y avoir une troisième voie

 

Chantait Bennato (3) il y a bien longtemps, en prophète.

 

Une
troisième voie liée à une formation dont l’éthique n’est pas fixée par un Idéal
aveugle et féroce pour tout ce qui ne rentre pas dans les cases et se regroupe
«  sans loi » (4) dans les non-lieux du monde contemporain. Mais il
s’agit d’une éthique orientée justement de ce réel. Et donc, dire éthique
suffit déjà à se remplir la bouche de bonnes intentions, alors que ce qui est
en jeu est une formation qui permette de pratiquer l’art d’improviser sa propre
vie, et de dépasser chaque fois son propre ne rien en vouloir savoir de
«  la cause de sa propre horreur de savoir, détaché de celui de
tous » (5). Entre le père et le pire, qui vont de soi, chaque tour doit
inventer et créer un vide, un espace hétérotopique, non utopique, où mettre en
acte un choix forcé sans garantie aucune de réussite. De petites choses du
quotidien qui puissent ouvrir des horizons inédits à des destins tragiquement
marqués par les propres fantasmes, la débilité personnelle ou le propre délire
de toute-puissance. Le plus souvent cela ne se traduit pas en actes héroïques
ni peut-être en exploits, mais beaucoup plus difficilement en une discipline
dans le parler qui tienne compte des possibles effets du propre dire.

 

Je me
réfère ici à une vignette que j’ai trouvée très éclairante : un homme
parle à une foule de gens, il est sur une table suspendue dans le vide et ceux
qui écoutent l’instituent (rester debout est un des signifiés d’instituer, d’où
l’institution), tous les autres se trouvant à l’autre extrémité en contrepoids,
moins un qui s’en va. Cependant il ne s’agit pas d’en faire tomber un pour en
faire arriver un autre, mais de subvertir une logique. Le vote est réduit à des
questions de marché. Il s’agit de faire en sorte que les décisions politiques
ne soient pas exclusivement dictées par les prophéties des sondages, mais
soutenues par une éthique personnelle qui consonne avec un vivre démocratique.
Je pense au maire de Riace, Mimmo Lucano, au médecin de Lampedusa, Pietro
Bartolo, et à l’eurodéputée Judith Sargentini.

 

Je n’ai
pas vécue la guerre mais j’en porte les effets dans les paroles de mes parents
et grands-parents qui l’ont traversée. Même les discours peuvent tuer, alors
que le vote de mai 2019 soit orienté en pensant aux conséquences qu’il peut
avoir, sans penser satisfaire ses propres vœux.

 

(1) Cf. Paola Bolgiani, « Arginare il pericolo
per la civiltà – Il padre o il peggio ? », in Politica lacaniana, Rosenberg
& Sellier, Torino 2018, pp. 95-102.

(2) J. Lacan, « … o peggio », in Altri scritti, Einaudi, Torino
2013, p.539.

(3) E. Bennato, Non è amore, L’uomo
occidentale, Warner Music Group 2003.

(4) J. Lacan, Il
seminario. Libro XXIII. Il sinthomo
, Astrolabio, Roma 2006, p. 134.

(5) J. Lacan, « Nota italiana », in Altri scritti, op. cit., p. 305.


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