LWFF Argument et programme 2022-3 : Traduction française

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LES DÉLIRES – Sous la direction de Jacques-Alain Miller

Argument

Le Séminaire sur « Les Délires » se tiendra durant la période académique 2022-2023 dans le cadre du London Workshop of the Freudian Field, fondé par Jacques-Alain Miller le 13 Juillet de cette année. Il fera partie des recherches et études qui mèneront au Congrès 2024 de l’AMP, dont le thème a été annoncé par Jacques-Alain Miller : « Tout le monde est fou » [1].

On peut situer cette annonce au sein de notre ère de dépathologisation et de tentatives de remplacement de la clinique par le droit. Face à cela, les analystes lacaniens répondent que : « La santé mentale, soyons francs, nous n’y croyons pas […] la santé mentale n’existe pas, on en rêve, c ‘est une fiction […] chacun son grain de folie » [2]. Lacan n’a pas dit « tout le monde est normal ».

La psychanalyse nous enseigne que le droit n’est pas capable de régler la relation particulière de l’être humain avec la réalité, une relation que Freud a découverte précaire, soumise au « principe du plaisir, en tant qu’il implique la possibilité de rêve […qui] nous apparaît comme hallucinatoire » [3]. De fait, le principe de réalité ne remplace jamais entièrement le principe de plaisir et le parlêtre aime les marques de ses rêves et hallucinations dans la vie qu’il construit.

L’aphorisme auquel nous dédions nos études continue : « tout le monde est fou, c’est-à-dire délirant » [4]. Mais « cette folie générique et générale, universelle plutôt, ça n’est pas la psychose » [5]. Nous aurons à étudier dans le détail les manières particulières dont le délire est construit dans l’expérience psychotique. Nous nous fonderons, parmi d’autres textes, sur la conférence de Jacques-Alain Miller de 1995 intitulée « L’invention du délire » [6], dans laquelle il fait référence au « binaire phénomène élémentaire/délire », qui répond à la tentative de différentier les éléments communs à tous les êtres parlants. « Étant donné que le moi-je de tout un chacun est délirant, on peut considérer qu’un délire est une amplification de ce que chacun porte en lui, ce que l’on peut écrire ainsi : délirje (deliryo) ».

Néanmoins, dans la clinique de ce « chacun », il s’agira de localiser « dans l’ensemble du discours délirant les éléments minimes, discrets, les éléments premiers à partir desquels le reste se construit, se développe et s’élabore ». Cette approche cherche à localiser le phénomène élémentaire, celui qui fonctionne comme axiome de base, incompréhensible et dérangeant pour le sujet mais qui, en tant qu’axiome, ne peut être mis en doute. « Devant ce fait brut et bizarre qui surgit en lui » – un écho de pensée, un mouvement involontaire, des hallucinations et événements de corps – « le sujet réagit en tentant d’en rendre compte, avec des explications et des constructions délirantes ».

Bien que le phénomène élémentaire et le délire soient deux moments différents de l’éruption d’une maladie, les deux phénomènes dérivent du fait que l’être humain habite le langage voire, dans certain cas, est habité par lui. Jacques-Alain Miller énonce ainsi trois propositions sur lesquelles nous pouvons nous appuyer dans notre travail :

1) « Le phénomène élémentaire est à la psychose ce que la formation de l’inconscient est à la névrose ; bien qu’à une échelle réduite, il nous montre la structure de toute la maladie ».

Dans les formations de l’inconscient, un signifiant fait appel à un autre signifiant et un lapsus se produit parfois et surprend le sujet, aliéné par un lien entre signifiants qui ne dépend pas de ce qu’il a l’intention de dire, mais qui introduit une nouvelle signification. Au contraire, il s’agit dans le phénomène élémentaire d’une signification de signification qui est d’un côté totalement incompréhensible et énigmatique pour le sujet, mais qui de l’autre s’accompagne de la certitude qu’elle le concerne personnellement, un fait extrêmement dérangeant devant lequel il ne peut fuir et devant lequel il reste perplexe. La répétition du phénomène élémentaire constitue un pousse-au-délire, un instant que Lacan a appelé « moment fécond ». Il y’a ici deux temps en jeu. Au premier, le sujet est passif et confronté à une perplexité insoutenable. Au second, il entreprend un travail actif d’interprétation et d’invention.

2) Le phénomène élémentaire peut s’approcher à partir de la métaphore et de la métonymie, les deux mécanismes fondamentaux de la production de sens.

Dans le moment de perplexité, quand aucun sens ne peut être donné qui puisse satisfaire la pulsion, nous faisons face au paradoxe d’une métonymie immobile qui ne glisse pas, en même temps qu’une métaphore impuissante. Au lieu du soulagement que la pensée peut apporter, un état de confusion diffuse et angoissée est donc produit.

3) Un opérateur de la perplexité : S(?)s

Pour finir, Jacques-Alain Miller propose un opérateur très simple de la perplexité sous la forme de la formule S(?)s. C’est un opérateur qui affirme que, dans le phénomène élémentaire qui cause une perplexité insoutenable, il y’a implicitement ou explicitement un signifiant.

Nous nous engagerons dans ce séminaire en suivant l’invitation de Lacan, transmise par Jacques-Alain Miller, d’être un peu plus psychotiques, un peu plus perplexes, et de ne pas éliminer toute question du fait de notre savoir préalable. 

A partir de leur définition psychiatrique, nous étudierons plusieurs formes de délire, chacune illustrée par un cas clinique.

Le comité du London Workshop of the Freudian Field

Gabriela van den Hoven, Peggy Papada, Philip Dravers, et Susana Huler 

 

[1] Clôture des Grandes Assises de l’AMP en ligne sur le thème « La femme n’existe pas », 3 avril 2022.
[2] Miller, J.-A., « Parler avec son corps », Mental, n° 27-28, 2012, p. 127.

[3] Lacan J., Le Séminaire, Livre XVI, D’un Autre à l’autre, Paris, Seuil, 2006, pp. 196-7.

[4] Lacan J., « Pour Vincennes », Ornicar ?, n°17-18, 1979, p. 278.

[5] Miller J.-A., « L’orientation lacanienne. Tout le monde est fou », cours du 11 juin 2008, inédit.

[6] Miller J.-A., « L’invention du délire », La Cause Freudienne, n°70, 2008, pp. 81-93. (Les citations non attribuées appartiennent à ce texte).

 

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