NLS Minute – 5

– 5 –

De fait

Claudia Iddan

Israël

Depuis S. Freud, les signes discrets, les petits détails
du discours du parlêtre ou ceux de fait orientent la clinique. Telles de
petites boussoles, ils indiquent la direction de la cure à l'analyste. Pour
exemple, le regard jouissant de l’Homme aux rats qui, au moment de raconter la
torture terrifiante, avait donné son nom propre, sa trace singulière.
 

Le domaine de l’art représente l'une des sources
d’inspiration dans la recherche et l’éclairage de questions fondamentales du
psychisme, ainsi que de certains signes discrets qui sont à même de révéler une
structure. Je prendrai ici référence à l’art moderne, plus précisément au body-art, où la performance exhibe crûment
le corps humain, sa matérialité, dans une tentative de dévoiler le réel et
d’élever sa deshumanisation au rang d’œuvre d’art. La mutilation corporelle en constitue
la plupart des fois la voie préférée.

La performeuse Marina Abramovic se présente comme « la
grand-mère de la performance ». Pour elle, les performances sont des
actions de vie, pas des spectacles, et leur « fondement se trouve, selon
elle, dans la libération au moyen de la douleur : dans chaque cérémonie traditionnelle
ou rituelle, les gens essaient de dépasser la limite entre la douleur physique
et l’élévation de l’esprit afin de contrôler le corps et casser les chaînes de
la peur. »

Dans toutes ses performances, c'est soit le public, soit
elle-même qui marque son corps. J’ai entendu dernièrement un texte présenté par
Nassia Linardou-Blanchet dans lequel elle cite l’exemple où la performeuse
avait marqué sur son ventre l’étoile communiste et s’est laissée saigner
jusqu'à l’évanouissement. Il convient de rappeler ici que ses parents étaient des
partisans, ayant lutté aux côtés de Tito. La douleur physique remplit ici une double
fonction : casser toutes les chaînes symboliques et arriver à s’approprier le
corps en le contrôlant.

Ces marques sur le corps, à
quoi correspondent-elles ?

A ce sujet, J.-A. Miller fait le commentaire suivant :
« les piercings de bijoux incrustés sont à la mode aujourd’hui. Les
tatouages aussi. La mode s’est clairement inspirée de la psychose ordinaire.
Certains usages des tatouages sont un critère de la psychose ordinaire, lorsque
vous sentez que, pour le sujet, c’est une manière de s’attacher lui-même à son
corps. Cet élément supplémentaire fait office de Nom-du-Père. Un tatouage peut
être un Nom-du-Père dans la relation que le sujet a avec son corps. »[1]

Je propose de penser ce type de marques sur le corps
comme une inscription réelle, une Inscription de facto, de fait, qui « fait
office de Nom-du-Père et s'inscrit directement sur le corps sans passer par le
symbolique : une simili-castration en quelque sorte. » On connaît, dans la
clinique, ces cas de psychoses où le sujet introduit la castration de fait
par la coupure du membre viril.

Si l'on revient au body-art, à la performance, l’action
exposée peut fonctionner comme sinthome en transformant le corps qui se défait
en œuvre d’art.

L’idée d’une opération « de fait » trouve sa
place dans le tout dernier enseignement de J. Lacan. Avec l’introduction du
nœud borroméen, les trois registres, imaginaire, symbolique et réel, sont
équivalents, ont le même poids. Cela conduit, bien entendu, à des changements
qui mettent en relief, d’un côté la place du symptôme-sinthome et, de l’autre,
celle du corps. L'un de ces changements est le passage de la fonction
« une » du Nom-du-Père à la « multiplicité » de versions du
père, où chaque version opère sur un registre différent. Dans le séminaire Le Sinthome,
le mécanisme de la Verwerfung, c'est-à-dire la forclusion du Nom-du-père,
adopte une forme supplémentaire et nouvelle qui opère plutôt sur le corps, plutôt
sur l’imaginaire que sur le symbolique. Lacan l’intitule Verwerfung de fait [2].
James Joyce constitue l’exemple paradigmatique de la fonction « de cette
démission paternelle, de cette Verwerfung de fait, dans le fait que
Joyce se soit senti impérieusement appelé… » On sait, avec J. Lacan, que
cet écrivain réussit à se faire un nom propre et à l’élever à la dignité d’un
Ego qui donne une consistance à son corps.

La Verwerfung de
fait
est liée à la démission paternelle, à une carence qui, bien entendu,
active différents types de réponse en relation avec le corps. Je voudrais
proposer l’Inscription de fait du côté du sujet comme une réponse
possible qui fait aussi écho au dé-fait paternel.

[1] J.A. Miller, Effet retour sur la psychose
ordinaire
, Retour sur la psychose ordinaire, Quarto 94-95, p. 46.

[2] J. Lacan, Livre XXIII Le Sinthome, Editions
du Seuil, Paris, p. 89.


*********************

Congrès de la NLS 2016
Dublin,
les 2 et 3 juillet
2016
 
 

 

  https://twitter.com/NLSCongress2016   https://www.facebook.com/NLS-Congress-2016-933316580050024   www.nlscongress.org

 
Congrès : 180 euros 

Etudiants (-26 ans) : 90 euros 

 Soirée/Repas du samedi soir : 50 euros


 Horaire du congrès : Samedi de 9h à 18h
– Dimanche de 9h à 15h.

Le paiement peut se faire
selon trois modalités
:

1 – Paiement sécurisé par
carte de crédit via ogone – https://amp-nls.org/page/fr/211/inscriptions

2 – Paiement par virement
bancaire (provenant uniquement de pays de l'union
européenne)

BAN : BE38
0014 5620 0372, BIC : GEBABEBB.

BNP Paribas Fortis, Agence
Albertlaan, Gand.

3 – Paiement par chèque
(uniquement chèques français).

À libeller au nom de la NLS
et à envoyer à Lynn Gaillard, 333 rue de la Vie Dessus, 01170 Echenevex,
France
.

 

 

 

New Lacanian School
Désinscription: envoyez un message à : nls-messager-unsubscribe@amp-nls.org

Nous contacter: nls-messager-help@amp-nls.org

Nouvelle inscription: https://amp-nls.org/page/fr/42/sinscrire-nls-messager

| Le site de la NLS www.amp-nls.org

New Lacanian School
Unsubscribe by sending a message to:nls-messager-unsubscribe@amp-nls.org
Enquiries:
nls-messager-help@amp-nls.org

New registration: https://amp-nls.org/page/gb/42/sinscrire-nls-messager

| The website of the NLS www.amp-nls.org

 

Back to list