NLS
Societies and Groups of the NLS
NLS-QUÉBEC
Compte rendu des 3èmes journées d’étude de NLS-Québec
« Signes discrets dans les psychoses ordinaires – Cliniques et
traitements »
avec Jacques borie et Laurent Dupont
traitements »
Par
Eléa Roy, membre de NLS-Québec
Les
6 et 7 février 2016, se tenaient à Montréal les
troisièmes journées d’études de NLS-Québec. Le
thème de cette année s’articulait avec celui du
congrès de la NLS en juillet prochain à Dublin, à
savoir « Signes discrets dans les psychoses
ordinaires – Cliniques et traitements ». Jacques Borie, membre de l’ECF, de la
NLS et de l’AMP, ainsi que Laurent Dupont, membre de l’ECF, de
l’AMP et nommé AE en août 2015, nous ont fait le
plaisir de traverser l’Atlantique et venir
jusqu’au Québec pour discuter de ce thème.
-
Un exposé de Jacques Borie a introduit le
thème des journées. Il est nécessaire de
saisir que la psychose d’aujourd’hui n’est
plus celle du temps de Freud, à l’époque où
l’Autre tenait le coup. Pour saisir ce qu’il
en est de cette nouvelle clinique, à l’heure
où la figure de l’Autre se décompose, il est
nécessaire de se pencher sur les petites
choses, les petits détails d’une
psychopathologie de la vie quotidienne. Ces
signes, qu’ils soient langagiers ou corporels,
le psychanalyste doit les repérer et en
prendre acte.
Le
parlêtre est le produit de la rencontre du corps
avec lalangue. Toutefois, le symbolique introduit
un désordre dans le vivant, et pour faire avec
cette dysharmonie, pour faire tenir le tout, Lacan
a introduit la notion de sinthome. C’est avant
tout ce à quoi nous avons affaire dans la clinique
de la psychose ordinaire. Dès lors, on se doit de
s’interroger : quel usage le sujet fait-il pour
traiter la jouissance ? Le psychanalyste
accompagne alors le sujet dans ce travail de
limite, afin de la border, de la serrer. Dans une
clinique du signe, on cherche à saisir ce qu’il en
est du rapport du signifiant avec le corps. Mais
le savoir, le psychanalyste ne le détient pas à
l’avance, il est plutôt à envisager comme un dépôt
de la clinique et par conséquent, notre travail,
comme le dit Jacques Borie, c’est « l’abri du
non-sens ».
Ces
journées se sont poursuivies avec la présentation
de trois cas issus de la clinique, puis deux cas
tirés d’œuvres littéraires fictionnelles, tous
discutés par nos deux invités :
-
Ruzanna Hakobyan nous a présenté
le cas d’une jeune femme rencontrée en
analyse, et pour qui, de l’urgence subjective
qui la précipite, se saisit de ce travail pour
qu’une « hâte aux séances » s’installe. Elle
trouve alors, chez l’analyste, un point
d’ancrage, un port pour faire tenir le corps
et se garder de l’errance qui peut surgir.
-
Ensuite, Geneviève Houde
a témoigné du cas
d’une femme accueillie dans un centre de
psychothérapie. Devant une difficulté quant à
la question de la rencontre avec l’Autre sexe,
ce cas nous a donné l’occasion d’interroger
les questions d’identifications, de collage,
et l’usage de l’image et du costume comme
voile par rapport au réel.
-
Anne Béraud a présenté le
parcours analytique d’une jeune femme qui se
saisit du lieu de parole, et de son analyste
comme point de capiton, pour se tenir à
l’écart d’une pente mélancolique dont on
repère les signes discrets. Pétrifiée sous une
identification d’être de déchet, elle réussit
toutefois dans le transfert à tenir à distance
ce signifiant « folle » qui la désigne et à se
construire une image plus stable pour faire
tenir le corps.
-
Dans un
second temps, Anne
Marché Paillé nous a
proposé une lecture particulièrement
intéressante de Lol V. Stein, héroïne bien
connue de Marguerite Duras. C’est autour de
l’objet regard que l’histoire de Lol a été
interrogée, depuis celui de la scène du bal
jusqu’au regard qui ouvre sur un ailleurs.
Pourrait-on envisager le traitement de l’absence
de corps, comme un rebroussement vers une
position mystique ?
-
Enfin,
Fernando Silveira Rosa nous a fait découvrir le
personnage de Macchabée issu du
roman « L’heure de l’étoile » de l’auteure
brésilienne Clarice Lispector. Pour faire face
au sentiment de vide et au hors-sens des
phénomènes qui assaillent son corps, ce
personnage singulier semble se saisir, entre
autres, d’une nomination de dactylographe et
d’un travail sur la lettre, où le néologisme
lacanien motérialité prend toute sa valeur.
-
Pour débuter la
deuxième journée, nous avons eu l’honneur
d’entendre le témoignage de Laurent Dupont, deuxième
témoignage de son parcours
comme Analyste de l’École. Particulièrement
touchant et enseignant, ce témoignage a permis
au public de saisir le trajet singulier d’un
analysant. Ce témoignage a été
particulièrement saisissant quant à
l’importance de chaque tranche d’analyse. Les
particularités de chaque analyste se révèlent
nécessaires et respectant le temps du sujet.
De la production de sens qui renvoie à
l’infini et qui n’a pas de point d’arrêt,
l’analyse produit dans un dernier temps un
vidage de sens pour que l’analysant en fasse
un sinthome. Ainsi, de ce qui usait le sujet,
il peut alors en user. Entendre l’énonciation
de Laurent Dupont nous a enseigné à tous, mais
surtout à chacun, au singulier. Elle nous
enrichit sur le parcours d’un analysant et
aussi plus largement quant à la psychanalyse.
-
Pour clore ces
journées et profiter de la venue de Jacques Borie au Québec, une
rencontre-débat autour de son livre « Le
psychotique et le psychanalyste » a été
organisée à la librairie Paulines à Montréal.
Cette rencontre, animée par Benjamin
Mortagne et Eléa Roy, a permis à
Jacques Borie d’exposer un angle de la
clinique qui rompt avec les discours dominants
sur les psychoses en Amérique du Nord. Elle a
suscité une vive curiosité et un grand intérêt
du public qui a largement participé au débat.
En
somme, chacun a pu tirer de ces rencontres un
enseignement qui lui est propre, théorique comme
clinique. La richesse des interventions de nos
invités et cliniciens, et les échanges qui en ont
découlé ont su (r)éveiller chez chacun le goût de
se mettre au travail, d’interroger sa propre
clinique, ou encore sa propre analyse.
Nous
en remercions vivement nos deux invités.
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