Société Hellénique : Compte-rendu du séminaire Nouages

 

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Activités des Sociétés et Groupes de la NLS
 
Activities of the Societies and Groups of the NLS

 

 

 


SOCIÉTÉ HELLÉNIQUE DE LA NLS
 

 

Compte-rendu du séminaire Nouages
à Athènes du 20 septembre 2014


par Dossia Avdélidi
membre de la NLS et de la Société hellénique de la NLS

 

 

 

Le séminaire Nouages, organisé par la société hellénique de la NLS et présidé par Epaminondas Theodoridis, s’est tenu à Athènes samedi 20 septembre 2014.
Dans l’amphithéâtre de l’hôpital G. Gennimatas et en présence du nouveau président de la NLS, Yves Vanderveken, les soixante-dix participants ont eu l’occasion d’assister à cinq interventions passionnantes. Le thème du séminaire reprenait celui du prochain congrès de la NLS qui aura lieu à Genève, les 9 et 10 mai 2015 : Moments de crise.

Dans son intervention théorique, Yves Vanderveken nous a rappelé la définition de la crise selon Jacques-Alain Miller : la crise, c’est quand « le discours, les mots, les chiffres, les rites, la routine, tout l’appareil symbolique, s’avèrent soudain impuissants à tempérer un réel qui n’en fait qu’à sa tête »1, la crise c’est « le réel déchaîné, impossible à maîtriser »2.

Dans les années soixante-dix, Lacan déclare qu’il ne peut pas y avoir de crise de la psychanalyse. C’est sans doute parce que la psychanalyse s’occupe de ce qui ne va pas, précise Yves Vanderveken. Il soutient ainsi que la psychanalyse est affine de la crise et du réel. C’est pour cette raison que la crise, sans être un concept psychanalytique, intéresse la psychanalyse. La psychanalyse rencontre précisément des moments de rupture de l’ordre symbolique sous la forme du trauma ou du symptôme. Il s’agit des moments de crise dans l’économie subjective où une jouissance contingente et imprévisible émerge, troue l’ordre symbolique et le défait.

Mais si la psychanalyse n’est pas en crise, ceci ne signifie pas qu’elle ne change pas, qu’elle ne se modifie pas sous les effets de l’époque. L’ordre symbolique n’est plus ce qu’il était. Les semblants sont dénoncés et tout ordre est remis en cause. Tout discours est désormais empreint du sceau du « faux » potentiel, du virtuel. Nous sommes dans l’ère du fake généralisé, de l’incroyance généralisée, du règne du non-dupe. L’objet a n’est plus au-dessous de la barre, il s’est dévoilé, il n’est plus enserré sous sa représentation signifiante, il est nu, cru, déchaîné et frénétique.

Yves Vanderveken souligne que la dévalorisation des semblants et le détricotage des grandes constructions sociales produisent des affects privilégiés : le désenchantement, habité de colère, le sentiment de tromperie et de laisser tomber mais surtout l’ennui. Quand tout n’est que semblant et vain, la seule chose qui sonne alors vrai, nous dit Yves Vanderveken, c’est la sensation. D’où l’explosion des pratiques de corps diverses, opérant comme marques réelles : l’usage des drogues, les pratiques des sports extrêmes, la sexualité réduite à des pratiques de corps désincarnés où l’impératif de jouissance prime. Jacques-Alain Miller précise que nous sommes passés non seulement du temps de l’interdiction à celui de la permission mais aussi au temps de la monstration quasi forcée et ouverte à tous. Nous assistons alors à la réduction de la dimension métaphorique au profit d’une dimension dite « réelle ».

Yves Vanderveken souligne que la psychanalyse face à ce dénudement des semblants n’a pas à rendre les armes. Elle doit l’interpréter, mais il ne s’agit plus entièrement de l’interprétation-vérité qui lève le refoulement. Un autre statut de l’interprétation est nécessaire ainsi qu’un autre statut de l’inconscient. Il donne alors toute sa valeur à l’indication de Jacques-Alain Miller concernant l’orientation de la cure : conduire l’analysant à être « dupe d’un réel », « que sa débilité cède à la duperie du réel ». L’enjeu sera désormais de serrer et isoler dans une cure, par-delà la vérité menteuse, un réel singulier et contingent cause du sujet.

Il revient alors à la psychanalyse de restituer un réel, qui n’est pas semblant. Dans une analyse, nous sommes confrontés à des rémanences des modes de jouissance. Il ne s’agit pas des moments à se remémorer ou à déchiffrer. Le signifiant y manque. Cette rencontre manquée entre le corps et le signifiant fait trauma. Elle fait alors retour par des bouts itératifs qui indexent ce moment de la rencontre ratée, et la psychanalyse, nous dit Yves Vanderveken, est un excellent observatoire de ce moment de crise.

Dans la partie clinique du séminaire, trois cas ont été présentés et discutés. Philippe Stasse, secrétaire de la NLS pour l’Europe de l’Est, membre de la NLS et de l’ECF, a présenté un cas de psychose où le sujet, Christophe, vit dans le présent d’une crise aiguë et perpétuelle. L’intervention de l’analyste consiste à essayer de calmer l’angoisse et de trouver une solution pour tenter de renouer le nœud défait. Christophe vit un profond et angoissant déchirement entre l’amour d’une femme et l’appel à la prêtrise, qui sans l’appui du symbolique, le plonge dans de profonds tourments. À défaut de devenir prêtre, l’analyste lui suggère de devenir diacre – ce qui lui permettra de rester lié à une femme. Christophe a saisi, de cette intervention surgie dans le transfert, ce qui lui permettra de se tenir à une certaine distance de ce qui lui faisait menace.

Inga Metreveli, membre de la NLS, a présenté le cas d’une patiente de 39 ans qui consulte l’analyste pour une « crise de couple ». Le discours qu’elle tient fait d’elle la « victime », elle ne veut rien savoir de sa propre jouissance. Deux interventions de l’analyste ont permis, dans un premier temps, de sortir du simple récit des histoires tragi-comiques de sa vie quotidienne et de parler de son roman familial où deux signifiants – pute et forcée – se répètent et dans un second temps de libérer sa parole et de prendre de la distance avec son fantasme.

Thanos Xafenias, membre de la NLS et de la Société hellénique, a présenté le cas de Yannis, un homme de 28 ans qui a recours à une cure de désintoxication suite à l’éventualité de son emprisonnement. La crise est survenue pour lui au moment où il s’est retrouvé à l’université car la perspective de faire des études s’appuyait uniquement sur le désir de la mère. La drogue, qui constitue la réponse de Yannis à la dimension du manque, lui a permis de se séparer du désir de la mère ainsi que de l’idéal familial. Une intervention de l’analyste lui a permis de passer de la drogue à l’ennui en le conduisant à dire que son problème n’était pas la drogue, mais le fait qu’il était un enfant gâté.

À la fin de la journée Réginald Blanchet, membre de l’ECF, de la NLS et de la Société hellénique, a pris la parole pour parler de la politique de la violence extrême, politique exercée en Grèce par le parti nazi Aube dorée. Il soutient alors que la violence est ce qu’il est convenu de subsumer sous le vocable courant de « crise ». La Grèce est, à cet égard, le point de la plus haute condensation de la violence de la crise et le symptôme même de la crise en Europe. Et si la puissance électorale d’Aube dorée continue à monter, c’est parce que l’électeur de ce parti, opte pour cette violence politique, anti-démocratique et raciste, il vote pour cette violence.

La discussion avec les participants, après chaque intervention, fut passionnante, car elle était vivante et éclairante.

1- La crise financière vue par Jacques-Alain Miller, Marianne, 10 octobre 2008.
2- Idem.

 


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