PIPOL NEWS 13 (Français)

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PIPOL NEWS 13

7.01.2013

Français

Vous
trouverez ci-dessous une version courte du texte d’introduction aux
Simultanées
de PIPOL 6 qui se dérouleront sous le titre : « La cas, l’institution,
et mon expérience de la psychanalyse ». La version complète
de ce texte peut-être consultée en cliquant sur :
PIPOL NEWS 2

 Un
appel à contributions pour les simultanées sera diffusé
prochainement.

 

Le cas, l’institution, et mon expérience de la
psychanalyse

Introduction aux simultanées cliniques de PIPOL 6

(Version courte) 

L’institution est une
manifestation du discours du maître. L’ancien paradigme de
l’institution est l’Œdipe familial1.
Néanmoins, en épinglant le monde contemporain par
l’expression Après l’Œdipe, Jacques-Alain Miller
nous conduit à élargir notre grille de lecture des institutions
sociales ou de soin. Après l’Œdipe d’autres
éthiques sont venues orienter les institutions, suppléant
à la fragilisation du lien familial et occupant la place vacante
laissée par le père. Dans ce nouveau paysage institutionnel, les
cas les plus heureux sont ceux qui se laissent orienter par la psychanalyse.

Dans le Champ freudien, la question
du mode de présence de la psychanalyse dans une institution est
étudiée depuis de longues années. On
s’aperçoit que le praticien qui a l’expérience de la
psychanalyse a très souvent un rapport juste et un savoir-faire
inédit avec le réel de la clinique. Nous voulons expliciter ce
point lors des simultanées de PIPOL 6.

Du discours et de lalangue en
institution

L’orientation de la
psychanalyse en institution passe par un effort de bien dire, mieux dire, dire
autrement.
À la place de « il vole
tout le temps », on préfère : « il
décomplète l’Autre ».
À la place de « il est
très violent », on préfère :
« il passe souvent à l’acte », le passage
à l’acte étant une parole qui passe dans le « faire »
faute de pouvoir se dire.
À la place
de « il est hyperactif », on préfère :
« la jouissance lui fait retour dans le corps ».

Cet effort d’arracher le
discours ambiant de l’institution aux coordonnées imaginaires,
éducatives ou « scientifiques » de
l’événement clinique aux fins de le localiser dans la
structure, n’est pas un simple humanisme de bonnes intentions car, quand
on dit les choses autrement, on les modifie.
À la longue, ces formules deviennent un langage institutionnel
qui détermine une politique de l’institution face au
réel de la clinique. En même temps, un praticien qui a
l’expérience analytique réinvente à chaque fois, en
fonction du cas, un bien-dire inédit, qui se décale du langage institutionnel
commun, quel qu’il soit.

D’où vient cette capacité
d’invention ?

C’est que de faire la lecture
de sa propre lalangue dans son expérience de la psychanalyse, le
praticien est aussi bien disponible à lalangue d’un autre.
Il lit dans la narration du sujet ce qui est écrit au-delà de
l’écran du langage. Cette lecture du langage le plus privé
du sujet permet au praticien de répondre de façon inventive,
au-delà du langage institutionnel.   

L’institution comme canevas de
la lettre

Lire lalangue ne
nécessite pas toujours un effort de traverser la narration du sujet,
puisqu’à l’occasion lalangue est à ciel
ouvert. Dans ce cas, le praticien s’immisce dans cette lalangue en
participant et encouragent le sujet à élaborer un travail de la
lettre et ainsi enrichir sa lalangue, sans insister à comprendre
ni se précipiter à plaquer un sens sur ce langage privé.
Tous les éléments de la structure institutionnelle sont à
disposition pour mettre en œuvre ce travail de la lettre : les
espaces, les portes, les véhicules, les activités, les ateliers,
etc. Ce partenariat « sujet-praticien » peut alors
dessiner des circuits pulsionnels et y circuler, border une jouissance
affolée qui éclabousse les alentours, pluraliser un Autre
persécuteur et trop consistant, condenser hors corps une jouissance qui
envahit le sujet, faire une rencontre d’un essaim de signifiants qui
permettent au sujet de s’engager dans la voie d’un sinthome
singulier.

De la langue privée à
la langue publique

Mais il n’y a pas que la
lettre. Dans d’autres cas, le lien de travail se tisse par un arrachement
du sujet à la dimension autistique de sa lalangue, afin de la
verser dans le langage. C’est une application du principe lacanien
concernant les enfants autistes : « il y a sûrement
quelque chose à leur dire »2. Ce principe est
ainsi élargi au-delà de l’autisme stricto sensu vers
la dimension autistique de tout sujet. Il s’agit justement de parler avec
ce qui ne s’adresse pas à l’Autre, en introduisant lalangue
dans le dialogue. Le patricien soumet alors au sujet l’hypothèse
d’un Autre du code. Le sujet dit : « aïne né
ka la audornuit ? », et le patricien lui répond :
« mais si, Nadine est là aujourd’hui, elle est dans la
cuisine ». La substance institutionnelle ne sert pas ici de canevas
pour tracer la lettre, mais offre une matière à la construction
d’un Autre.

Un élément majeur dans
cette construction de l’Autre est la réunion
d’équipe. Celle-ci opère comme un au-delà du
praticien auquel ce dernier peut se référer. Si toute
séance analytique implique la présence de l’Autre du
langage comme tiers, la réunion donne souvent la consistance
nécessaire à ce tiers dans le travail institutionnel. Ce lieu
d’au-delà où la parole s’incarne dans plusieurs voix
qui s’échangent allège le poids du rapport imaginaire entre
le praticien et le résident, forgeant dans les certitudes une forme de
dialectique.      

Avoir l’expérience de la
psychanalyse

Il faut avoir
l’expérience de la psychanalyse, avons-nous dit, pour lire lalangue,
d’abord la sienne, ensuite celle de l’autre. Ajoutons : il
faut faire l’expérience de sa propre jouissance pour la manier
dans la rencontre avec l’autre, sans passer par le père, la
castration, la justice, la morale. Ou encore : Il faut connaître le
divan pour se passer des idéaux d’une institution, et s’en
servir à la fois.

Pourtant, le savoir-faire du
praticien n’est pas établi. Tant que l’analyse n’est
pas finie, ce savoir ne se sait pas, néanmoins, il transperce aussi bien
le savoir qui s’élabore dans l’institution que la doctrine
psychanalytique en général.

Eh bien, le projet audacieux des simultanées
de PIPOL 6 sera d’approcher, par des dires, ce point indicible, en
mettant en évidence le triangle qui se forme entre le cas,
l’institution et l’expérience de la psychanalyse du
praticien. Des praticiens analysants, qu’ils soient analystes ou pas,
parleront à partir d’un cas, de la façon dont ils ont pu
s’appuyer sur leur propre expérience de la psychanalyse pour lire lalangue,
la soutenir, la verser dans le langage public et manier le discours de
l’institution pour extraire et soutenir les solutions inventives du
sujet. 

Gil Caroz,

Directeur de PIPOL 6

EuroFédération de
Psychanalyse

1  LAURENT E., « Institution du fantasme,
fantasmes de l’institution », Feuillets du Courtil, n°4,
avril 1992.

2  LACAN J., « Conférence à
Genève sur le symptôme »  (1975), in Bloc-notes de
la psychanalyse
, n°5, 1985.

 

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